Mauvaise pub pour l’hypersexualisation des ados
En février 2012, la sénatrice UMP Chantal Jouanno a remis à Roselyne Bachelot, Ministre des solidarités et de la cohésion sociale, un rapport sur l’hypersexualisation des pré-ados et des jeunes filles. L’occasion pour Adozoom de se pencher sur ce phénomène, loin d’être nouveau, mais qui prend une nouvelle ampleur.
« Moi, je m’appelle Lolita… »
Campagnes de pub, surexposition dans les media, dénudement suggestif, nombreux sont les signes de cette hypersexualisation qui retentit directement dans l’esprit de nos ados et les influencent. Le marketing est indéniablement à l’origine de cette mouvance. C’est lui qui a développé sans tabou et sans limite « l‘ado-objet ». Dakota Fannings, âgée de 12 ans, dans le clip du nouveau parfum « Oh LoLA » de Marc Jacobs en est l’exemple. Les publicitaires de tous poils accentuent et diversifient l’iconographie érotisée, en jouant du besoin d‘affirmation des ados.
Comme les grandes
Loin des clichés de la nymphette, qui pouvaient aider à garder une certaine distance dans la représentation, les adolescentes sont représentées habillées en femme, dans des situations qui pourraient être celles d’une citadine, trentenaire, allant à son travail. On ne fait plus semblant : on est une femme. Le cap du non-retour est franchi.
« Jours après Lunes », site de lingerie pour nourrisson, enfant et adultes proposent des triangles pailletés, le tout de bonne facture et dès 4 ans. Symptomatique, la catégorie ado – femme est la même et les tailles vont du XXS au L. Les modèles, les coupes et les prix sont équivalents. Jusqu’où vont ces ressemblances ?
Attention, fragile !
Dans son livre « Déshabillez-moi », Sarah Stein met l’accent sur le besoin de l’ado de se protéger et de se construire. L’étude que Sarah Stein a menée montre que loin de penser qu’une bretelle de soutien-gorge qui dépasse serait une provocation sexuelle, cela répond, dans la très grande majorité des cas, à un besoin d’affection de reconnaissance sans perversion.
Boule d’émotions et d’appels, l’ado a besoin de dialogue. Plutôt que de stigmatiser une jeune fille de 15 ans qui met une mini-jupe, il est important que les adultes, sans la brusquer, lui rappellent la notion de respect de soi-même et de son corps et l’incitent à comprendre l’impact qu’elle pourrait avoir sur les autres.
Devenir une femme
Jean-Michel Fize, chercheur au CNRS, va plus loin. Il nous rappelle que le rapport sur l’hypersexualisation des ados répond de manière démagogique à l’angoisse des parents, en présentant une vision « angoissée et apocalyptique » de l’adolescence. Et que si le marketing connait ses cibles, il ne faut ni généraliser ni oublier que la loi française punit les images pédophiles. Mais surtout, les parents doivent être confiants dans leurs ados qui, fières d’être des jeunes filles, veulent sans tabou et sans perversion apprendre à devenir des femmes.
La mère occupe une place privilégiée : elle connaît les codes de la féminité. Mais toute autre personne du même sexe que l’ado peut être un confident. Car il s’agit bien là de confiance et d’apprendre, aussi, à devenir grand.
Zoom sur les sweet lolitas
Au Japon, et de plus en plus souvent en France, on assiste au phénomène inverse : les sweet lolitas. Qu'est-ce que c'est ? Contrairement aux lolitas classiques qui veulent faire croire qu’elles sont des femmes, les sweet lolitas, plus âgées (elles ont en moyenne entre 16 et 18 ans) sexualisent leur part d’enfance en adoptant un dress code mais aussi une façon de se comporter en société. Les Sweet lolitas s'habillent à la façon du XIXe européen, avec des couleurs et des froufrous. Les vêtements proposés vont des habits de poupées aux tenues gothiques. Elles s'habillent à la manière de poupées de porcelaine : cheveux bouclés en longs rouleaux, teint éclairci et maquillage baby doll à outrance, jupons et jupes à hauteur des genoux gonflés de dentelles et collants ou chaussettes hautes à motifs déliquescents. Ce costume, qui est celui d’une princesse des temps passé, n’est pas innocent : les coupes sont structurées, les corsets omniprésents, le maquillage ultra-travaillé. Étrange paradoxe : un corps de jeune femme dans un costume d’enfant.
Cette mode vestimentaire révèle en réalité la difficulté de l’ado à faire le lien entre l’enfance et l’âge adulte. Prenez cette parenthèse comme un dernier moment de conte que s’offre votre ado. Montrez-lui que vous appréciez l’humour et, par petites touches, réconciliez-la avec une forme de beauté plus classique. Très souvent, les ados qui craquent pour ce style vestimentaire aiment le jeu. Pourquoi ne pas les initier à un jeu plus subtil et qui leur permet de rester elles-mêmes tout en se fondant dans la société ?